Le chateau de super mario ; Loft de Yuzu Mizugashi

Nous arrivâmes en vue de l'entrée d'un garage sous-terrain dont la porte automatique se ferma si tôt que nous fûmes à l'intérieur. L'entrée du parking avait été placée exprès à deux cent mètres du parking pour permettre aux riches habitants de cet immeuble huppé du centre ville de pouvoir sortir de chez eux sans être gênés. Je bénéficiais donc d'une sortie discrète qui permettait à Blackberry de courir librement les rues de Katashura une fois le soir venu. Je garais le véhicule à côté d'une autre voiture de sport dans mon garage particulier, et en fit sortir la petite chinoise. Nous entrâmes dans un ascenseur et j'utilisai la clef magnétique qui permettait d'accéder au dernier étage de l'immeuble ; cette clef était en quelque sorte celle de mon appartement, car le dernier étage complet et la petite terrasse m'appartenaient et moi seule y avait accès.

"Euh, j'ai un appartement au dernier étage. Personne ne devrait vous chercher là, l'entrée de 'immeuble est gardée en permanence."

J'espérais que la jeune arabe ne se sente pas trop mal-alaise mais je ne pouvais m'empêcher de penser que de son point de vue, la situation devait paraître quelque peu étrange. Quand les portes coulissante s'ouvrirent je fis entrer mes invités dans l'appartement luxueux de l'actrice que j'étais en réalité.

Dans le couloir de l'entrée, un placard ouvert révélait une impressionnante collection de bottes, escarpins et autres chaussures ainsi que des manteaux originaux de grandes marques de couture. Je passais devant et déposais mon sabre sur deux crochets qui étaient prévus à cet effet, priant la jeune fille de bien vouloir passer dans le salon. Je retirai le masque qui me cachait le bas du visage et défis les rubans qui attachaient mes cheveux. Dans la pièce éclairée par de petits spots, on distinguait plusieurs banquettes d'aspect confortable qui n'appelaient qu'à se laisser échoir dessus, et au milieu, sur des tatamis, une table basse en verre servait de table de salle à manger. Au mur un écran géant éteint surplombait une collection de DVD imposante dont une partie des films avaient mon nom ou même ma photo en jaquette. Des photos de moi que ma mère avait prise dans son studio décoraient les autres murs, aux côtés de calligraphies qui m'avaient été offertes. La cuisine qui s'ouvraient derrière cette salle à manger / salon était si propre que l'on put supposer qu'elle n'avait jamais servi ; et ce n'était pas complètement faux. Le peu que je préparais se limitait à mon petite déjeuner ; les autres repas, je les prenais le plus généralement dans des restaurant gastronomiques ou me faisait livrer à manger.

Je posais mes clefs et mon masque sur la table et passais mes mains dans mes cheveux pour les ramener en arrière comme je le faisais parfois lorsque la fatigue se faisait trop pesante. Je reportai mon regard sur les deux filles ; au milieu de tout ce luxe, elles n'avaient pas vraiment fière allure. Koneko reprit ses quartiers sans attendre ; il grimpa sur le dossier d'une banquette et se mit à ronronner doucement.

"Et bien, bienvenue... Il y a une chambre par ici, à côté de la mienne, vous pouvez l'utiliser, le lit est fait."

Alors que je me dirigeai vers ladite chambre, je pris une seconde pour leur montrer la salle de bain.

"Si vous désirez prendre une douche ou un bain, ne vous gênez pas. Pour le spa, les instructions sont en kanji, demandez moi et je vous le mettrai en route."

La salle de bain elle même reflétait le luxe ; nombres de miroirs recouvraient les murs et faisaient de la pièce un véritable palais des glaces. Une cabine de douche tout en verre posée à même le sol dominait une baignoire qui avait tout d'une petite piscine. Sur le côté, deux vasques en pierre noire servaient de lavabo et une collection de produits de beauté remplissaient une étagère en verre accrochée au mur.

"Si vous avez besoin de quelque chose, demandez le moi maintenant, car je dois me lever tôt demain, et j'ai réellement besoin de dormir pour ne pas avoir une tête de zombie."

Zzzz... la marmotte chinoise ne s'était pas réveillée de tout le trajet, bien trop fatiguée pour se permettre le luxe d'un sommeil agité. Mieux encore, elle ne se réveilla que le lendemain aux alentours de midi, comme quoi elle en avait bien eu besoin, de ses douze heures de sommeil ! Lorsqu'elle ouvrit les yeux, la première chose à laquelle pensa la jeune fille fut : je suis vivante. Ne sachant plus trop si elle devait en être heureuse ou non, elle resta allongée pendant deux bonnes minutes sans bouger, à simplement observer l'endroit dans lequel elle se trouvait. A vrai dire, tout était assez flou pour elle... elle se souvenait juste s'être endormir sur le dos d'une blonde étrangère, avoir été sauvée par deux personnes, avoir entendu une histoire de lien qui expliquait son état déplorable, mais rien de plus. Au fond, elle avait tellement de questions à poser ! Encore un peu fatiguée, elle s'assit sur son canapé et ne put s'empêcher de regarder ses pieds qui lui firent une drôle de sensation lorsqu'elle les posa par terre. Ha ben oui, ses vêtements à elle n'étaient pas recouverts de sang, mais ses pieds, c'était une autre histoire ! Nan, là, il lui faudrait frotter sec pour qu'ils soient propres comme des sous neufs. Une minute... ses vêtements ? Reprenant ses esprits peu à peu, la chinoise se rendit compte qu'elle se démarquait surtout grâce au manque de vêtements ! Parce qu'on ne pouvait pas dire qu'elle était couverte, là... bon sang, ça faisait combien de temps qu'elle se baladait en sous-vêtements comme ça, encore ? Ils ne lui avaient même pas donné un pantalon, quoi ! Elle se sentit bien gênée rien qu'à pensée qu'elle avait été trimballée dans cette tenue à travers la ville, tiens.

Après un bâillement sonore, elle passa une main dans ses cheveux ébouriffés, histoire de les remettre un minimum en place, et reprit sa petite analyse de la pièce où elle se trouvait. Hum... beaucoup de photos, beaucoup de luxe surtout... bon sang, quelle télé ! Un écran pareil, elle n'en avait jamais vu, quoi ! La personne qui vivait ici devait être sacrément riche pour pouvoir s'offrir tout ça. Tout ici sentait assez bon le propre, on peut pas dire que c'était le cas dans la cabine où ils l'ont forcée à vivre pendant autant de temps ! Finalement, le début de sa nouvelle vie ne lui déplaisait pas trop, restait plus qu'à espérer qu'on ne la jetterais pas dehors dès aujourd'hui maintenant qu'elle était tirée d'affaire. Bah, elle verrait bien !

La jeune fille se leva et s'avança un peu dans la pièce, s'arrêtant en face d'un second canapé dans lequel sa nouvelle binôme dormait encore. Heh... dans un instant de laissez aller total, elle se dit qu'au final, ce n'était pas si mal d'avoir été sauvée par une nana qu'elle trouvait assez jolie. Apparemment, ses vieux penchants avaient aussi été épargnés par la mort, dommage. Boah, non, pas la peine de vous imaginer qu'elle allait fantasmer sur la première venue non plus, elle avait d'autres choses à penser et elle avait banni l'amour de son quotidien depuis des années maintenant, s'était faite à l'idée qu'elle ne trouverait jamais d'âme sœur dans ce monde pourri où la tolérance n'est qu'une utopie. Bien, bien... elle n'allait pas réveiller l'arabe endormie, ça n'aurait vraiment pas été sympa, les questions pouvaient bien attendre qu'elle soit remise en forme ! Curieuse de savoir si la loft était vide, la chinoise commença son exploration, frappant à chaque porte avant d'entrer. J'vous raconte pas la tête qu'elle tira en découvrant les chambres ou la salle de bain... même la terrasse était énorme, avec la piscine et tout et tout... m'enfin, elle n'y découvrit qu'un matou en train de faire la grasse aprem' sur une chaise longue.

-"Hou, houuuu... y'a quelqu'un ?"

Bien sur, elle ne parlait pas fort, histoire de ne pas réveiller l'autre ; avançant sur la pointe des pieds en tirant le plus possible sur son t-shirt qui ne ferait jamais office de robe de nuit, hélas. Ne croisant personne, elle finit enfin par déboucher dans une cuisine du genre toute neuve et vierge de toute tentative culinaire ! Et c'est là que son ventre se mit à grogner, lui rappelant qu'elle n'avait rien avalé depuis des jours. Un regard en arrière, toujours personne de réveillé en vue, elle s'aventura dans la cuisine et entreprit d'ouvrir des armoires à la recherche d'un truc à se mettre sous la dent. Ben non, elle n'était pas chez elle, mais quand on a faim et qu'il n'y a personne pour vous surprendre, voilà quoi ! La jeune fille continua donc ses petites fouilles alors que son ventre criait famine en se disant que si elle se faisait discrète, on ne la retrouverait sans doute pas en train de baver devant de bêtes choses, comme une boite de céréales par exemple !

Au petit matin, en me levant, la présence de mes deux invités avaient momentanément quitté mon esprit et je sursautai en les trouvant toutes les deux assoupies sur mes canapés. Ashura avait passé un de mes peignoirs, elle devait avoir pris une douche avant de s'endormir, ce qui n'était pas le cas de la petite chinoise qui était resté tel que nous l'avions laissé la veille, échouée sur le ventre contre un coussin du canapé. les pieds couverts du sang en souvenir de l'incartade de la veille.
Je pris un petit déjeuner aussi rapidement que silencieusement puis allait me laver et m'habiller ; le rituel qui consistait à me remaquiller et à choisir ma tenue pour la matinée me prenait une bonne heure tous les matins, douche comprise, et durant tout ce laps de temps, les deux étrangères ne bronchèrent pas. J'enviais quelque peu leur grasse matinée. En quittant l'appartement je confiait les lieux à Koneko ; notre lien nous permettait de communiquer à distance, mais quand nous étions trop loin l'un de l'autre, nous ne parvenions qu'à nous transmettre des sentiments et non des idées claires ; je le sentais présent et il pouvait me faire comprendre si quelque chose allait mal ou au contraire si tout allait pour le mieux.

Ma matinée fut des plus classique ; je posais en maillot de bain dans un parc pour une marque de parfum dont j'avais déjà oublié le nom et cela monopolisa toute une équipe de photographes et de maquilleurs, éclairagistes et j'en passe. Quand mon agent me proposa de déjeuner avec la rédactrice du magazine de mode qui publiait les photos du dernier défilé auquel j'avais participé, je refusais poliment en prétextant avoir prévu un déjeuner en famille ; la bougresse savait pertinemment que je n'avais pas d'amis, du moins, pas d'amis avec lesquels je souhaitais manger.

Je rentrai donc chez moi et trouvait dans l'entrée de l'immeuble le repas que j'avais commandé pour trois personnes. Je pris les sacs et les montai en ascenseur jusque chez moi ; je pensais y trouver mes invitées éveillées, se tournant un peu les pouces, mais fut surprise de trouver Ashura toujours endormie dans la même position que bien plus tôt dans la journée. La petite, par contre, semblait être levée. J'entendis un peu de bruit dans la cuisine qui me confirmait que quelqu'un était levé.

*Elle a fait le tour du propriétaire, mais je crois qu'elle cherche quelque chose à se mettre sous la dent. J'aurai bien partagé mais..*

*Tu peux continuer à dormir, fainéant.*

*Trop aimable.*

Je posais le déjeuner sur la table du salon, en faisant le moins de bruit possible pour ne pas réveiller Ashura, et me dirigeai dans la cuisine. J'espérai seulement que la petite me reconnaitrai car la veille, elle n'avait pas vraiment les yeux en face des trous, et mon costume de Blackberry était d'un tout autre style que la mini robe blanche ultra décolletée que je portais aujourd'hui ; je ne portais pas non plus de masque et mes cheveux détachés tombaient sur mes épaules. J'étais différente de ce qu'elle avait pu voir la veille.
En entrant dans la cuisine, je la vis en train de fouiner dans un placard, piochant des poignées de céréales à l'intérieur d'un paquet en carton. Je pris un air dégagé et m'adressai à elle pour la renseigner sur la présence d'un repas chaud dans la pièce attenante.

"Si tu veux, il y a des brochettes de viande et du riz chaud dans le salon, ça te nourrira autrement mieux..."

Je la scrutai un moment et cru lire de la surprise dans ses yeux, c'est pourquoi je poursuivis sans plus attendre.

"C'est moi qui suis venu vous libérer hier soir. Je suis Blackberry, mais pour tout le monde ainsi que pour vous deux durant la journée, je suis aussi Yuzu Mizugashi. Enchantée de faire ta connaissance."

Je m'inclinai respectueusement devant la petite. Elle devait se demander si tout cela était bien réel et si elle avait réellement été sauvée par une bimbo en talons aiguille et si je n'étais pas en train de me payer sa tête, mais je décidai de ne pas m'en préoccuper et l'invitai à passer au salon. J'ouvris les sachets qui contenait notre repas et disposai le tout sur la table, en faisant signe à la petite dont j'ignorais encore le nom de prendre place à table. Avec un peu de chance, l'odeur de nourriture tirerait Ashura de ses rêves ; en tout cas, cela attira Koneko qui vint rapidement rôder autour de nous, dévisageant la chinoise avec attention.

Yun Li sursauta lorsqu'une inconnue l'interpella pour lui expliquer qu'il y avait plus consistant dans la pièce d'à côté... elle qui pensait se remplir la panse en douce, voilà qu'elle s'était faite attraper en pleine mission ninja. Tentant de ne pas perdre la face, elle rangea le paquet de céréales là où elle l'avait trouvé et suivit la blonde dans la pièce d'à côté. Hum... sincèrement, tout était tellement flou concernant la nuit d'hier qu'elle n'aurait jamais reconnu la deuxième de ses sauveuses si cette dernière ne s'était pas présentée comme telle. Vu la tenue que cette dernière portait, elle avait du mal à croire qu'elle avait pu la sauver, c'était somme toute compréhensible, non ? La chinoise, tirant toujours autant sur son t-shirt, alla se mettre à genoux devant la petite table... d'habitude, elle préférait s'asseoir en tailleur, mais avec ce qu'elle portait sur le dos, elle avait préféré opter pour une autre position. Finalement, se décidant enfin à ouvrir la bouche, elle parla doucement pour ne pas réveiller la blonde qui avait la chance de porter un peignoir.

-"Merci de m'avoir tirée de là, j'dois avouer que mourir encore ne me réjouissait pas trop."

La jeune fille baissa le regard vers la nourriture chaude qui l'attendait, mais son attention fut bien vite attirée par le réveil de l'arabe. Hum, à vrai dire, c'était comme si quelque chose en elle-même venait de s'éveiller en même temps, comme s'il y avait une autre présence dans son esprit qui commençait à se manifester. Alors c'était ça, le fameux lien ? L'adolescente pensait que ce serait difficile de s'y habituer, mais elle ne se doutait pas une seule seconde des autres conséquences que cela impliquerait ! Yun regarda distraitement son binôme se rendre sur le balcon et... et se rhabiller sans aucune pudeur ! Non mais, c'était quoi, ça ?! La chinoise en eut des yeux ronds comme des soucoupes et son rythme cardiaque augmenta légèrement. Inutile de vous préciser que le rouge lui monta aux joues, n'est-ce pas ? Non mais, elle n'avait pas honte ou quoi ? D'accord, il n'était censé n'y avoir que des nanas ici, mais même... Un peu gênée par cette vision relativement agréable, sans se départir du rouge de ses joues, la chinoise reporta bien vite son regard sur la bouffe et n'osa plus l'en détacher, cherchant à détourner toute forme de conversation qui aurait pu aller dans ce sens.

-"Ha, heu... merci pour le repas aussi !"

Toujours plus poli que l'autre exhibitionniste qui venait s'asseoir à table et engouffrait déjà le repas sans même un remerciement ! Encore un peu gênée, se demandant pourquoi elle réagissait comme ça alors qu'elle avait l'habitude d'être une sans gêne elle-aussi, elle n'osa même pas regarder sa binôme et se mit à manger à son tour, savourant un maximum. Elle n'avait pas eu droit à un repas correct depuis qu'elle était revenue à la vie, la même soupe dégueulasse avec du pain sec tous les jours, c'est vraiment pas le top, vous pouvez me croire ! En attendant, Yun était passée à autre chose et se demandait où elle avait déjà pu voir sa sauveuse. Yuzu Mizugashi, ça lui disait aussi quelque chose... c'est juste qu'elle n'était pas spécialement fan de télé, donc les pubs et films, ce n'était pas vraiment sa tasse de thé. Normal qu'il lui fallut de nombreuses minutes avant de s'en souvenir, ce qui lui arracha un :

-"Ha mais t'es une actrice, toi, non ?"

Bon, ce n'était peut-être pas le meilleur sujet à aborder... elle avait beau être actrice et posséder un appart' comme celui-ci, ça ne changeait rien au fait qu'elle devait probablement en avoir marre d'être suivie par des fans en délire à longueur de temps et que de lui parler de sa célébrité devait l'embêter plus qu'autre chose. Alors, histoire de rechanger de sujet encore une fois, elle préféra aller droit à l'essentiel.

-"Hum, j'dois vous avouer que j'pige pas grand chose à ce qui est en train de m'arriver, j'apprend d'un coup que je suis revenue à la vie, on essaie de me vendre, je suis à deux doigts d'y rester une seconde fois... j'suis un peu perdue, v'voyez... z'avez l'air de vous y connaître mieux que moi dans l'domaine, vous pourriez pas m'expliquer un peu ?"

Un coup d'oeil vers l'arabe en train de manger, on prend une bouchée de brochette et on attend de voir les réactions... en espérant avoir des réponses claires !

Je remerciai intérieurement la petite de ne pas persévérer à parler de mon activité diurne ; pour une fois que je pouvais parler à des gens qui s'intéressait à des choses bien plus fondamentales que mon dernier film, je ne tenais pas à gâcher ce moment. Quelque part, j'étais ravie de me trouver entourée de ces filles sorties du coupe gorge de la veille, une partie de moi se sentait plus vivante que jamais.

Je la senti un peu confuse alors qu'elle nous demandait de lui expliquer ce qui lui arrivait. Après tout ce qui lui était arrivé, il était normal que tout se bouscule dans sa tête ; je tentai de calmer le jeu en commençant par le début. A vrai dire, je comptais un peu sur elle et Ashura pour m'expliquer la nature du lien avec Koneko que j'explorai depuis quelques années maintenant. Je ne savais pas qu'il était possible de se lier à un être humain, j'en apprenais beaucoup depuis que j'avais pénétré ce yacht.

"Et bien, commence par nous dire comment tu t'appelles, ce sera déjà un début." Dis-je d'un ton léger en souriant. "Hélas, je ne vais pas pouvoir t'éclairer beaucoup sur les questions qui te tourmentent, j'ignorais jusqu'à hier soir encore les termes comme 'Anima', 'Familier', 'Elu'... Ca fait plus de deux ans maintenant que je suis liée à ce chat, et si vous deux êtes liées de la même façon que nous le sommes, tout ce que je peux te dire, c'est que vous serez bien plus proches l'une de l'autre que vous ne le serez jamais avec quiconque."

Je marquai une pause et observai Koneko en train d'essayer de chiper un morceau de viande ; je lui facilitai la tâche en le lui rapprochant.

"En ce qui me concerne, Koneko n'est plus un être qui vit à mes côté, il fait partie de moi comme je fais partie de lui ; ce que je ressens, il peut le ressentir et inversement. le savoir à mes côté est maintenant aussi normal que d'avoir deux bras, ou deux jambes ; me séparer de lui serait..."

Je m'arrêtai soudain car je réalisai que j'étais en train de m'aventurer en terrain sensible : Ashura avait vécu la mort de son compagnon de lien, son anima, la veille, la petite hirondelle qui gisait dans le couloir du yacht. Elle avait du en souffrir et je ne savais comment elle portai le deuil de son animal de lien. Peut être que, maintenant qu'elle était liée à une autre, cela faisait partie du passé, mais je ne souhaitais pas courir le risque. Je m'en voulu de gaffer aux premiers contacts avec ces filles que j'avais envie d'avoir comme amies, aussi m'inclinais-je en direction d'Ashura pour m'excuser.

"Je suis désolée..." bredouillais-je maladroitement.

Je me tus pour la laisser expliquer à la petite ce qu'elle avait à savoir, j'en profiterai pour apprendre également, espérant qu'elle ne prendrait pas ombrage de ma bavure. Le repas touchait presque à sa faim, et je laissai à Koneko le soin de nettoyer les quelques grains de riz qui trainaient dans mon bol.

*Bravo, poulette, bravo. Très habile.*

*Ta gueule.*

Beaucoup d'informations en même temps, pas toujours très réalistes cependant. Encore, des histoires de retour à la vie et tout, ça peut passer lorsqu'on le vit, mais des histoires de pouvoirs magiques... ils n'étaient pas dans un manga, merde quoi ! Au fond, la chinoise savait bien qu'elle ne pouvait que les croire, qu'elle ne pouvait que donner raison à son binôme qui était persuadée être douée de magie depuis qu'elles étaient liées. Non mais, quel dépaysement ! Un jour on est persuadé vivre dans un monde ennuyeux et peu de temps après un retour à la vie, on apprend qu'il est bien plus dangereux et emplis de mystères qu'on ne le pensait. Il ne manquait plus qu'une histoire d'extra-terrestres et le tableau était complet ! Tout ça la dépassait tellement qu'elle ne put retenir un gros soupir. Résumons donc la situation... le lien n'était pas quelque chose de seulement symbolique, il était concret. Là, il n'y avait aucun doute possible. Lorsque la blonde avait parlé de l'hirondelle de sa nouvelle partenaire, l'arabe n'avait pas réussit à lui cacher la vérité. Yun avait ressentit la tristesse de son élue sans même savoir comment elle avait fait ses comptes. Impossible pour elle de savoir comment elle avait pu ressentir les sentiments de quelqu'un d'autre, même pour un bref instant ; impossible pour elle de décrire ce que ça faisait... disons juste qu'elle venait enfin de comprendre que l'arabe allait vraiment être la seconde moitié de son âme. Brr, ça lui faisait déjà froid dans le dos sans même se douter de jusqu'où le lien pouvait aller. Pour le moment, elle supposait juste qu'elle ne pourrait rien cacher de ses vraies émotions à sa nouvelle partenaire et ça ne l'enchantait pas trop.

Enfin, allez savoir ce qui la dérangeait le plus ? Le lien en lui-même, qui la priverait de pas mal d'intimité, ou le fait d'être lié à une fille qui faisait partie d'une organisation criminelle du même genre que celle qui l'avait enlevée ? Rha, tout se bousculait dans sa tête, à force de trop réfléchir elle commençait à en attraper la migraine. Bon, après tout, il ne fallait pas juger. L'autre avait peut-être déjà tué des gens, mais elle semblait vraiment ne plus vouloir de ce genre de vie, alors on pouvait toujours attendre et voir comment tout ça allait se passer, non ? La chinoise n'avait plus vraiment le choix maintenant, la seule façon de briser le lien semblait être "tuer l'élu". Et sans élu, pas de seconde vie. Après un nouveau soupir qui en disait long sur son état d'esprit, elle se retourna vers l'arabe et croisa le regard de cette dernière. Sans vraiment s'en rendre compte, Yun s'était mise à sourire aussi. Enfin, sans s'en rendre compte... après quelques bonnes secondes à sourire aux alouettes, elle finit tout de même par détourner le regard et prendre un air plus dur et fermé, une vieille habitude de quand elle devait subir les moqueries incessantes des gens.
Il était temps qu'elle prenne un peu la parole.

-"Mouais, ça doit pas être trop mal de vivre ici."

En premier lieu, répondre à la question de l'actrice-ninja.

-"J'm'appelle Yun Li, et j'suis chinoise comme vous vous en doutez déjà."

Ben ça, c'est clair, surtout avec son petit accent qui n'arrêtait pas de squatter chacune de ses répliques depuis qu'elle avait été sauvée. Yun ne put s'empêcher de réagir à la dernière phrase de son binôme. L'arabe n'avait nul part où aller, les gens chez elle devaient croire qu'elle était morte... dans le fond, elle n'avait aucun "chez-elle" où rentrer, elle n'avait nul part où aller. La chinoise était dans la même situation, au final, l'arabe au nom encore inconnu n'avait rien à lui envier.

-"Perso c'pareil. J'suis morte, donc c'normal qu'ils pensent que j'existe plus. Et puis c'pas comme si..." L'espace d'un instant, l'image de son père levant la main sur elle pour commencer à la battre s'imposa dans son esprit. Son père adoptif, le mot adoptif était devenu très important au bout d'un moment. Son père adoptif, avec ses yeux de serpents cachés derrière ses lunettes, avec son sourire malsain... Yun Li attrapa son épaule droite avec sa main gauche et serra de toute ses forces, ce genre de souvenir n'étant jamais très agréable. "C'pas comme si qui que ce soit serait heureux de me revoir en vie, c'pas comme si j'avais une maison où rentrer non plus."

Xin n'était plus là pour l'accueillir à bras ouverts, elle n'avait jamais eu aucun ami et ce qui lui servait de paternel, n'en parlons pas... elle ne connaissait que le destin tragique de sa sœur et n'avait aucune idée de ce que les autres étaient devenus, elle n'avait pas envie de le savoir non plus d'ailleurs.

-"SDF à mon âge, si c'pas malheureux." Hop, une petite blagounette, histoire d'essayer de détendre l'atmosphère... bon, d'accord, j'avoue, histoire d'essayer de se détendre elle-même surtout. L'adolescente se retourna vers l'actrice et lui demanda : "Tu pourrais nous garder ici le temps qu'on trouve un endroit où crécher ?"

Voilà quoi, c'était toujours mieux de demander avant de squatter un endroit qui puait le luxe comme celui-ci.
Notez que pendant toute cette petite discussion, une petite tête blanche et fantomatique émergeait du sol derrière Koneko, une espèce de mini-moi fantôme de la chinoise ayant fort envie de s'amuser avec le chat. Comment était-il apparu là ? Mystère, Yun n'en était même pas consciente. Dans tous les cas, le fantôme comptait bien ne pas se montrer aux trois nanas en plein blabla ennuyeux et faire tourner le matou en bourrique !

Je me demande encore comment avais-je fait pour ne pas penser à ce qui allait se passer ensuite. Allait-on passer une après midi entre copine, se dire au revoir en se promettant d'aller faire du shopping ensemble le lendemain ? Ces deux filles étaient mortes, pour tout le monde ; elles n'avaient nulle part où aller, nulle famille à contacter, nuls amis sur qui compter. La seule et unique personne qui pouvait leur fournir un refuge et les aider, du moins pour le moment, c'était moi. Je ressentis alors un sentiment étrange, comme si aider ces deux demoiselles étaient le devoir le plus important qui m'ai jamais incombé ; je me sentis heureuse de pouvoir leur rendre service, de pouvoir les aider.

Soudain un léger frisson me parcouru l'échine et je ressenti comme une présence non loin de moi ; je tournai aussitôt la tête mais ne vis rien d'anormal. J'étais gênée de ressentir cette présence alors que je ne pouvais rien voir, et un miaulement craintif vint confirmer mon inquiétude. Je tournai la tête vers Koneko et le vis hérisser ses poils pour se donner l'air plus imposant qu'il ne l'était. Il feulait en regardant droit devant lui, vers un endroit où il n'y avait apparemment rien ; je me concentrai sur notre lien pour et tentai de comprendre ce qui se passait.

*Il se passe qu'il y a un fantôme dans le salon, tête de noeud ! *

Bien que je ne le vis pas directement, je sus qu'il disait la vérité, et qu'il y avait effectivement quelque chose. Je fermai les yeux et renforçai notre lien ; je ne vis pas la créature en question, mais cependant, les impression que Koneko me transmit me firent aussitôt penser à Yun Li, comme si le fantôme en question n'était que son image.

*Il y a du danger ?*

*Je ne crois pas, mais je sens que ce truc va m'emmerder sec !*

*Toi qui voulait de la compagnie...*

Je vis le chat bondir de l'accoudoir où il se trouvait pour aller se réfugier sous la table, et cette démonstration de courage me fit éclater de rire.

"Je ne sais pas encore ce que tu es capable de faire, Yun, je ne sais même pas si tu as fait ça délibérément;, mais tu as réussi à remuer ce poltron de Koneko !"

Alors que nous terminions notre repas avec un thé vert parfumé au jasmin, je revint sur la position un peu précaire de mes deux invitées. Pouvais-je les loger chez moi et jusque quand ? Est ce que cela se remarquerait ? Leur faudrait-il une couverture, ou même un véritable emploi pour subvenir à leur besoins plus tard ? Yun Li n'était même pas en âge de travailler pour gagner sa vie, un simple baito ne lui permettrait pas de se loger à Katashura... à part dans un certain manoir dans la forêt, mais les légendes allaient bon train sur cet endroit.

"Vous pouvez rester ici un moment si vous le désirez, vous êtes mes invitées ; comme je l'ai dit hier soir, mais vous avez préféré les canapés, j'ai une chambre à votre disposition, là bas. Cependant, si vous restez un moment, il va falloir que je trouve une raison à votre présence chez moi, vous comprenez, il y a beaucoup de journalistes et de photographes qui se complaisent à relater chaque évènement de ma vie dans leurs magazines, Deux étrangères inconnues qui vont et viennent ne passeront pas inaperçues longtemps."

En prononçant ces mots, je laissai mon regard inspecter Yun Li et Ashura. Elles n'allaient vraiment pas passer inaperçues, au milieu des habitants de cet immeubles qui n'étaient que de riches bougrgeois bien propres sur eux. Yun avait même encore du sang sur les pieds.

"Je crois que la première chose à faire va être de vous trouver d'autres vêtements... et toi, d'aller enlever tout ce sang qui macule tes pieds. On pourra aller vous acheter des affaires en ville, en attendant on trouvera quelque chose de moins voyant à vous mettre sur le dos, j'ai quelques fringues dans ma chambre."

A ce moment, Koneko bondit de sous là table en poussant un miaulement sur-aigüe ; il finit son saut sur mon ventre, me faisant renverser le contenu bouillant de ma tasse de thé. La moitié vint tremper ma robe blanche et l'autre ébouillanta le chat qui poussa un nouveau cri avant de déguerpir sur la terrasse en emportant par la même occasion un morceau de mon vêtement.
Je restai interdite pendant quelques secondes, hébétée par l'ouragan à poil gris qui venait d'agrandir plus que dangereusement mon décolleté.

"Tout va bien... ce n'est rien... cette robe ne coutait pas une fortune et je ne vais pas me servir de mon sabre pour découper ce chat et en faire des yakitori !" Dis-je en essayant de garder mon calme.

*Commence par dire à la chinoise de rappeler son fantôme, et on verra après pour les hostilités !*

Je me redressais lentement, non sans pester après mon chat, et tout en gardant une main sur les pans déchirés de ma robe pour ne pas avoir l'air de me promener en soutien-gorge devant mes nouvelles amies, je les invitais à visiter mon dressing et à choisir des vêtements qui leur plairaient.
Si je pensais m'être exprimée clairement en leur parlant de mes quelques fringues et de leur aspect moins voyant, je l'avais fait d'un point de vue que ni Ashura ni Yun Li n'avait jamais probablement envisagé. Les quelques fripes auxquelles je faisais allusions et qui devaient les aider à se fondre dans la masse remplissaient en fait une pièce si vaste que certains pourraient en faire un petit studio ou une chambre d'étudiant ; tous les vêtements étaient pliés, repassés, accrochés sur des cintres ou rangés dans des penderies en bois dont les portes en verre allaient du sol au plafond. Pantalons, shorts, mini-jupes, robes de créateurs connus, hauts avec ou sans manches, pulls en cachemire, vestes, tailleurs ; une large commode ne contenait que de la lingerie, des collants et des bas. Au fond de la pièce, un immense miroir permettait de s'admirer sous des spots de lumières, comme je le faisais pendant de longues minutes tous les matins.

"Vous trouverez sûrement quelque chose qui plaise là dedans, n'hésitez pas. Yun, cherche de ce côté, tu es un peu plus petite et plus fine, ça devrait mieux t'aller"

Pour ma part, j'attrapais une jupe noire, une veste et des collants rouge que j'allais enfiler dans ma chambre avant d'aller jeter ma robe déchirée à la poubelle.

Yun regarda la japonaise avec l'air de dire : qu'est-ce qu'elle me raconte, celle-là ? Faire peur au matou ? La jeune fille ne se rappelait pas avoir fait quoi que ce soit ! Et puis, on ne fait pas peur aux chats sans s'en rendre compte, tout de même, si ? Par contre, elle ne put qu'être d'accord quand la blonde lui demanda indirectement d'aller se laver un bon coup, parce que le sang sur les pieds, ça pue et c'est pas très agréable. Il faudrait voir pour des vêtements aussi, parce que se balader en sous-vêtements devant d'autres personnes, c'était sa première fois et ça la gênait toujours autant. Le fait qu'elles soient entre filles ne l'aidait vraiment pas à se sentir mieux ! Si par malheur les deux autres venaient à découvrir ses penchants particuliers, elles feraient sans doute leur max pour la virer d'ici à grands coups de pompes... il ne fallait pas se voiler la face, l'homophobie était très loin d'être acceptée, la tolérance n'existe pas ! Il n'y a qu'à voir Internet : un gigantesque défouloir pour homophobes. Le truc, c'était que si ce lien entre Ashura et elle grandissait encore en intensité, il y avait de fortes chances pour qu'elle découvre la vérité. Il faudrait trouver une excuse ou l'autre à ce moment là.

Yun se leva et suivit les deux autres nanas dans le dressing. Le choc ! Un dressing, ça, vraiment ? Non mais, l'actrice avait une tenue différente pour chaque jour de l'année ou quoi ? Limite, vu la quantité, elle avait déjà planifié toutes ses tenues pour les trois prochaines années à venir aussi ! La jeune chinoise avait surtout l'impression d'être dans un magasin de fringues fashion, c'était carrément dingue ! Le pire, c'est qu'il n'y avait que des vêtements qui faisaient trop... fille, et trop peu habillé aussi. Les jupes, c'était déjà pas son rayon, alors des mini-jupes il ne fallait pas y compter ! Rien ici ne correspondait à son style vestimentaire, mais alors rien ! L'adolescente fut tirée de sa contemplation par la voix de l'arabe, qui était restée là pour... pour la mater en train de faire ses essayages ? Mais, mais... non, quoi ! Enfin, c'était toujours mieux de lui parler que de continuer à avoir la tête qui tournait au milieu de tous ces vêtements ! Yun en profita donc pour rejoindre son binôme et s'éloigner elle aussi de ce dressing un peu trop fournit à son gout. L'arabe semblait vouloir parler pouvoirs magiques... à vrai dire, la chinoise avait encore bien du mal à y croire. La magie, tout ça... elle avait déjà assisté aux coups de foudre de l'autre sadique, mais même avec ça, elle ne pouvait pas se résoudre à admettre que c'était quelque chose de possible, pire encore, quelque chose d'aussi courant. Lorsque le clone disparut, la jeune chinoise ne put s'empêcher de bégayer quelques mots incompréhensibles avant d'inspirer un grand coup et de reprendre son calme.

-"Excuse, c'est juste que... la magie, c'est tellement nouveau pour moi, j'arrive pas à m'y faire ! Fin' bon, j'ai aucun pouvoir, ou alors j'suis pas au courant"

Après un soupir, la chinoise s'avança de deux pas vers le dressing et contempla à nouveau toutes ces fringues... avant de se retourner vers l'arabe et de lui dire franchement ce qu'elle pensait de toute cette histoire ! Inutile de vous dire qu'elle n'avait pas vraiment l'intention d'accepter l'offre de la japonaise aussi facilement, je suppose ?

-"Bon, la Yuzu elle est bien gentille, mais j'peux pas porter ses fringues là ! Nan, sérieux, ça va pas être possible ! Mais matte moi tout ça ! Les jupes, c'même pas la peine... et en version mini, encore moins ! Et ses pantalons, c'est plutôt du genre bien moulant, comme un peu tous les hauts que j'ai pu voir ! Y'a pas moyen j'te dis ! "

Le petit fantôme tout blanc en forme de mini-moi de Yun Li venait d'apparaître derrière cette dernière ; assit dans le vide, bras croisés et hochant de la tête à chacune des paroles de sa maîtresse. La dite maîtresse, elle, pointait négligemment le dressing du pouce, bien consciente que c'était la première fois qu'on faisait preuve d'autant de générosité avec elle, mais il y avait des limites quand même ! Disons qu'elle tenait un minimum à son image de marque, elle avait toujours été un peu garçon manqué, c'était pas pour s'habiller en nana un peu exhib' sur les bords quand même ! Le genre de vêtements qu'il lui fallait, c'était du large, limite du troué ou du vieux, quelque chose qui fasse mec et qui fasse limite un peu racaille aussi, pourquoi pas. Un peu dans le genre... dans le genre de ce que portait Ash' en ce moment, quoi ! ... TILT !

-"J'sais ! Tu vas me filer tes fringues ! Enfin, tu vas me filer celles de ton clone, quoi !"

En voilà une idée qu'elle est bonne, hein ? Bon, elles auraient pas l'air fines avec les même fringues, tiens... maintenant, restait à connaître un détail qui avait, mine de rien, son importance.

-"Fin', y'a moyen d'avoir les fringues sans le clone ? J'doute que tu puisses maintenir ton clone toute une journée et ça me ferait bien chier que ses vêtements disparaissent avec elle, quoi."

Je m'allongeai sur mon lit, le sourire aux lèvres ; depuis combien de temps n'avais-je pas eu deux copine avec qui parler simplement, échanger des fringues ou simplement passer du temps ? La situation, quelque peu inhabituelle dans ma vie si minutieusement réglée par mon métier, me plaisait beaucoup.

Je me défis de ma robe déchirée en songeant qu'il me faudrait réprimander Koneko et la jetai par terre nonchalamment ; m'attirer les bonnes grâces de ces deux filles et les garder comme amies avaient soudain pris plus d'importance que de perdre une fringue hors de prix. Même si ma célébrité et ma richesse me permettaient d'avoir plein de gens à papillonner dans mon entourage, la véritable amitié n'était pas une chose que l'on pouvait acheter, je ne le savais que trop bien. Mais qu'avais-je à offrir à Ashura et Yun Li, hormis ce qui faisait de moi ce que j'étais ? Après avoir tourné en rond dans ma chambre en sous-vêtements en me cassant la tête sur ces problèmes d'amitiés nouvelles, je pris conscience du ridicule de la scène et décidai de me rhabiller avant que les deux autres filles ne sortent du dressing. Je les entendais parler à l'intérieur, mais ne prêtait pas attention au sens des paroles ; écouter aux portes n'étaient pas la meilleur des choses à faire si je voulais atteindre mon but.
J'enfilais donc mes collants et ma jupe, ajustait le col de ma veste pour me faire un décolleté très plongeant et m'observai dans le miroir. Manquer d'originalité et de provocation n'était pas dans mes habitudes vestimentaires, aussi enfilais-je en plus des bas résille noirs qui trainaient au pied de mon lit.

En attendant qu'Ashura et Yun Li ne se décident, j'entrepris de me recoiffer et de me remaquiller. Elle ne devaient plus en avoir pour très longtemps.

... c'était l'idée de dessaper son clone au moins quelques heures qui lui faisait cet effet là ou quoi ? Nan mais, elle ne peut pas être exhib' le matin et pudique à ce point avec un double sous contrôle l'après-midi, quoi ! Yun regarda son binôme retomber sur ses fesses en pâlissant à vue d'oeil sans comprendre ce que cette nana avait bien pu voir d'aussi effrayant. L'arabe pointait une direction du doigt ? Très bien, la chinoise tourna la tête vers la dite direction et vit... et vit... le vide ! Le fantôme venait de disparaître dans un petit nuage de fumée un dixième de seconde plus tôt. L'adolescente poussa un gros soupir, son lien avec la blonde était tout juste assez fort pour lui permettre de ressentir sa peur mais n'était pas encore assez développé pour lui permettre de comprendre l'origine de la dite peur. Incapable de comprendre ce qui venait de se passer, un peu blasée aussi, la chinoise s'avança vers l'arabe au sol et s'accroupit devant elle, histoire d'être presque à sa hauteur.

-"D'accord... tu m'expliques ?"

Il fallait bien qu'elle ait quelques explications sur ce qu'il venait de se passer, non ? Après tout, si elle était tombée sur une cinglée psychopathe et paranoïaque atteinte d'hallucinations, il valait mieux être au courant tout de suite. Le pire, c'est que vu sa veine, il était franchement possible que ce soit ça ! Bon, bon, d'accord... elle ne s'était pas inquiétée de savoir ce qui arrivait à sa compagne juste pour ça, j'avoue ! Le fait qu'elles soient liées toutes les deux poussait la chinoise à s'inquiéter un minimum pour son élue, plus vite elle serait rassurée, plus vite cette terreur qui ne lui appartenait pas quitterait son esprit. Et puis... ben, c'est que... disons qu'une jeune fille effrayée, ça donne toujours envie de la rassurer, v'la ! Yun, qui avait ancré ses yeux dans ceux de l'arabe, devint rouge comme une pivoine à cause de cette dernière pensée ! Ne pouvant supporter le regard de la blonde avec cette pensée en tête, elle détourna le sien, de regard. Non, non et non ; elle ne pouvait pas s'imaginer Ash' comme étant une petite chose mignonne à rassurer, c'était absolument hors de question ! Rha bon sang, ce qu'elle s'en voulait de toujours s'imaginer des choses pareilles, c'était horrible ! Les joues encore un peu rougies, n'osant toujours pas regarder l'autre dans les yeux, elle lança sur un ton faussement désintéressé :

-"Allez, mademoiselle j'ai-peur-de-mon-ombre, accouche !"

Allez, penser à autre chose... comme à la chose qui avait bien pu lui faire une telle frayeur ! Yun s'attendait à tout, ou presque. La chinoise s'imaginait déjà que son élue avait vu une araignée ou une petite souris, au moins elle aurait vraiment eu l'air ridicule ! De quoi lui donner une raison de se moquer un peu, hé hé ! Enfin, lorsqu'elle aurait entendu la réponse de l'arabe, l'adolescente se relèverait et tendrait la main à cette dernière, histoire de l'aider à se relever. Tout ça sans oublier qu'elle avait besoin des fringues du clone, parce qu'elle n'oserait jamais sortir de cette pièce dans l'une des tenues de la japonaise ! Il lui fallait au moins un pantalon, un vrai !

*Bon sang, c'était quoi ce truc tout à l'heure ? Ce modèle réduit de chinoise, je savais que c'était pas une bonne idée de les amener ici, maintenant y'a des fantômes qui nous... Oh non d'un chat, le revoila !*

Koneko gonfla ses poils et feula en regardant le petit fantôme de Yun Li s'approcher de lui. Quand il ne fut plus qu'à un mètre, il bondit dans la direction opposée en miaulant et cavala jusque dans la chambre en faisant crisser ses griffes sur le parquet pour ne pas déraper. Comme s'il avait le diable aux trousses, il se précipita sous le lit en me passant entre les jambes ; je manquai de perdre l'équilibre et me rattrapai à la coiffeuse près de laquelle je me trouvais.
J'écarquillai les yeux en voyant entrer dans la chambre une petite réplique de la chinoise, hilare, qui se dirigea vers le lit sans se préoccuper de ma présence. A son approche, Koneko sorti de sa cachette et fit irruption dans le dressing ou Ashura et Yun Li étaient en train de discuter.

*RAAAH ! Un cul de sac ! Je suis fait ! MAIS JE VENDRAI CHEREMENT MA PEAU !*

"KONEKOOOOO !" hurlai-je à voix haute autant qu'en pensées. "Tu me flingue une autre robe et je te jure que je me fais une écharpe avec ta fourrure !"

Je couru dans la pièce, suivie de près par le petit fantôme dont l'importance à mes yeux était bien moindre que les dégâts que cette canaille de chat de gouttière pouvait causer à ma garde robe. Je fus emportée dans mon élan et profitai de l'occasion pour me ridiculiser involontairement devant Ashura et Yun Li. Je crois que c'est depuis ce jour que j'ai arrêté de me promener en collants dans l'appartement, car sur le parquet de ma chambre et de mon dressing, ça glisse. Je me dérapai en poussant un petit cri ridicule et me retrouvais les quatre fers en l'air au milieu de mes vêtements.

Le fantôme, lui, avait l'air de bien se porter. Merci pour lui. Il semblait prendre plaisir à me voir ainsi vautrée dans mes affaires, et je pense qu'Ashura et Yun Li qui avaient été spectatrices forcées de la scène partageaient son humeur. Je toussais brièvement et en m'adressant à elles, je demandai :

"Bon alors, vous ne vous habillez pas ? Vous allez quand même vous coiffer un peu, non ? Yun Li, je veux bien, mais même moi,je trouve que ta robe est un peu courte, tu devrais au moins mettre des collants, ou un short, tiens, j'en ai un qui t'irait super bien. Aïya, je crois que je vais avoir un bleu sur les fesses moi... oh, euh, désolée, vous étiez en train de discuter, vous voulez que je sorte ?"

Dans son coin, Koneko était toujours en train de rayer le plancher en gémissant sans quitter des yeux l'ectoplasme facétieux.

D'accord, tout ça n'était qu'un rêve. Ash' qui parle de fantômes, c'était déjà assez bizarre ; mais voir le chat faire un rush zerg dans la chambre, rapidement suivit d'une blonde japonaise qui se vautre lamentablement et d'un fantôme qui a la même tête que soi, c'est franchement flippant. Yun ferma les yeux et secoua la tête, se demandant ce qui était en train de se passer ici... j'veux dire, même les plus mauvaises séries américaines n'atteignent pas ce niveau de stupidité et d'étrangeté ! Je ne vous parle même pas de la japonaise qui oublie carrément la présence d'un esprit dans sa maison pour parler fringues. La chinoise voulait bien que la magie, les retour à la vie et tout le tralala existaient ; mais ça ne voulait pas dire qu'il fallait faire comme si de rien n'était quand un truc pareil arrive, quoi ! L'adolescente inspira un grand coup et se dirigea vers le petit fantôme, approchant sa tête de la sienne et le regardant dans les yeux... tout au fond, c'était presque comme si casper était une autre partie d'elle-même.

-"Je me doutais bien que ma vie serait plus bizarre qu'avant, mais pas à ce point."

Le petit fantôme décida de retourner embêter l'arabe, trouvant sans doute que c'était extrêmement amusant de la voir aussi effrayée ! La preuve, il ne se gênait pas pour se marrer comme une imbécile ! Enfin, elle ne se gênait pas pour se marrer comme un imbécile... hum... il... elle... un... une... c'pas comme si un fantôme avait un genre, si ? Fantôme Li décida d'aller mettre sa main dans la tête de la jeune arabe. DANS la tête, oui. Après tout, un spectre, c'est immatériel, il peut se glisser où il veut, même dans les corps des gens. Là, son bras transperçait de part en part la tête d'Ash'. Limite, Yun se demanda si elle n'était pas devenue subitement folle à lier.

-"Très bien... toi, le fantôme, tu viens ici tout de suite ! Au pied ! Avant que mademoiselle la trouillarde ne nous fasse une syncope en direct !"

Et aussi étrange que cela puisse paraître, le fantôme obéit avec une mine boudeuse. La chinoise commençait à se demander s'il ne s'agissait pas *vraiment* d'une manifestation de son pouvoir. La jeune fille attrapa le bras du fantôme... qui était tangible pour elle ! Bon, elle pouvait donc attirer des p'tits spectres et leur mettre une raclée, c'était déjà ça. Là, il était temps de mettre les choses au clair une bonne fois pour toute, parce que cette situation devenait vraiment ennuyante : le chat dingue était en train de sombrer dans la démence la plus totale, l'arabe allait peut-être fondre en larmes et la japonaise était prête à faire une conférence de deux heures et demies sur la dernière mode vestimentaire à Tokyo !

-"Écoute-moi bien, le spectre : je te laisse deux minutes pour retourner d'où tu viens et arrêter de nous embêter, c'est bien compris ?! "

Et... hop ! L'air toujours aussi boudeur, le fantôme tourna le dos à Yun et s'effaça lentement, jusqu'à disparaître entièrement. Le silence revint dans le loft, c'était presque comme si rien ne s'était jamais passé ! Après de longues secondes d'attentes, la chinoise fut persuadée que le drap volant lavé avec dash liquide était vraiment partit et ne risquait pas de revenir de sitôt ! Soupir de soulagement !

-"Bon, écoutez, moi j'vais aller me laver avant de m'habiller, tout ce dont j'ai besoin c'est du froc du clone d'Ash' !" L'adolescente se tourna vers la japonaise, ne sachant pas trop comment lui expliquer ce choit... finalement, elle opta pour la méthode la plus simple. La sincérité : "Désolée, c'est juste que ton style vestimentaire et le mien... c'est... juste pas compatible ! J'sais bien que c'est pour m'aider, être sympa et tout ça mais... j'peux vraiment pas, là ! J'vais toujours me fringuer dans les rayons hommes, j'me sent vraiment pas à l'aise dans c'que t'as l'air de porter au quotidien !"

Elle attendit une autorisation de la japonaise avant d'aller squatter la salle de bain, voulant juste ne pas trop s'imposer non plus.

-"C'bon, Ash' ? Tu vas tenir le coup ? N'nous fait pas d'arrêt cardiaque avant de m'avoir légué ton pantalon surtout !"

Et hop, la voilà rapidement partie vers la salle de bain ! Là, pour le coup, elle avait l'impression d'avoir été un peu expéditive et autoritaire, mais toute cette situation lui semblait tellement irréelle qu'elle ne savait pas comment réagir autrement, tout simplement. Lasse de toutes ces bizarreries, elle retira le peu de vêtements qu'elle avait sur le dos, les laissa négligemment trainer sur le sol et se glissa sous la douche. Là, au moins, elle allait passer un petit moment de détente sous l'eau chaude : elle allait pouvoir dé-stresser, retrouver son calme et essayer d'avoir les idées claires sur tout ce qui venait de se passer. Là, elle était vraiment perdue, un peu angoissée aussi dans un sens.

Plus qu'à espérer qu'elle ne retrouverait pas tout ce beau monde en train de faire un twister avec des zombies lorsqu'elle sortirait de la salle de bain ! Rien que cette idée lui arracha un petit sourire... qui ne dura pas très longtemps.
Après tout, elle venait de découvrir que tout était possible dans ce monde de dingues.

Quelque peu estomaquée par les directives subites de la fillette, je lui donnait l'autorisation qu'elle semblait attendre pour aller se laver ; un tour par la salle de bain ne serait pas un luxe. Quand elle eut quitté la pièce, nous nous retrouvâmes, Ashura et moi, toutes deux assises par terre, elle se remettant du semblant de frousse que le fantôme de Yun Li lui avait flanqué, moi tâchant de resserrer un peu ma veste qui s'était ouverte dans la chute ; elles allaient finir par croire que je passais mon temps à me retrouver en soutien-gorge.

*On vient de voir un fantôme et toi tu penses à ta poitrine et à tes fringues ? Ma pauvre, tu ne changera jamais...*

*Les fantômes sont immatériels, non ? Et bien ils ne peuvent pas nous faire de mal alors. CQFD.*

*Mais je l'e crois pas, t'es vraiment aussi naïve que tu en as l'air ?*

*La ferme, monsieur le téméraire.*

Tandis que je me relevais, j'adressais un regard à Ashura ; nous venions de nous faire rabrouer par la petite, gentiment, certes, mais sûrement. Je regardais autour de moi en renouant la ceinture de ma veste sur le côté : plus une trace de l'ectoplasme ; cela apaisa Koneko qui repartit se cacher sous mon lit. Je reportai mon regard sur l'arabe et dis avec un sourire :

"C'est dommage, je suis certaine qu'avec ce mini-short sur les fesses et ce haut, elle ferait craquer tous les adolescents du quartier... "

Je pris dans une armoire un short blanc avec une ceinture de strass et le tint à hauteur de mes yeux.

"Celui ci est vraiment moulant pour moi, il lui ira parfaitement. Ah, et avec ce haut, elle sera une superbe mini-moi !"

Je choisis un haut noir particulièrement moulant et dont le col asymétrique ouvrait de belles perspectives sur qui le portait. Je regardais Ashura pour m'assurer qu'elle approuvait ma démarche et continuai ma sélection pendant que l'eau commençait à couler dans la douche. Je lui pris des sous-vêtements noirs, toujours sous un short blanc, assez banals, quoi que chez moi le banal impliquait toujours de rester sexy, mais ne trouvai pas de soutien-gorge qui put convenir à la chinoise ; cela ferait partie des affaires que nous allions avoir à acheter. Je me retournai vers Ashura et lui tendis les vêtements que j'avais sélectionné avec soin.

"J'aurais mis des collants ou des bas, mais je ne pense pas que cela soit utile pour cette affaire. Tu veux bien aller porter les habits de ton clone à notre amie ?" Demandais-je avec un sourire complice.

Je l'accompagnai ensuite près de la salle de bain et, m'arrêtant avant d'arriver à la porte, je lui mis la main sur l'épaule et lui dis à voix basse pour m'assurer que le bruit de l'eau couvrirait notre conversation :

"N'oublie pas de récupérer son vieux tee-shirt tout sale, il faut le mettre à lave. Ah, et le second peignoir qu'il y a sous le lavabo. Et puis viens attendre dans ma chambre, je vais te coiffer un peu parce que là, ça part dans tous les sens."

Je reculais prudemment en me retenant de rire, gardant un oeil sur Ashura et une oreille tendue vers la salle de bain. Cela faisait longtemps que je ne m'étais pas amusée de telles banalités ; une simple farce jouée à une amie, je n'avais plus fait ce genre de tour depuis des années et je trouvais un malin plaisir à retomber quelques instants en enfance.

*C'est ça, venge moi poupée ! Venge moi !*

La douche, y'avait que ça de vrai ! Yun profita longuement de toute cette bonne eau chaude qui lui coulait dessus, bien plus détendue qu'elle ne l'était quelques minutes plus tôt. Honnêtement, si le fantôme en lui-même ne lui avait pas fait peur, le fait qu'il soit issu de pouvoirs magiques lui appartenant était beaucoup plus effrayant pour elle. Enfin... elle aurait tout le temps d'y penser plus tard ! Une fois nettoyée de fond en comble, la chinoise décida de se laver les tifs lorsqu'elle entendit quelqu'un entrer dans la salle de bain. Ash', qui lui expliqua qu'elle posait les vêtements sur le bord de la baignoire. Bon, pas de panique Yun ! L'arabe n'en a rien à faire de te mater sous la douche, vraiment, et dans le pire des cas t'es en train de lui tourner le dos : elle ne peut voir que tes fesses ! Rien de grave, n'est-ce pas ? Mouais... n'empêche qu'elle était rouge comme une pivoine, notre p'tite chinoise ! Le simple fait qu'une autre nana soit si proche d'elle alors qu'elle était en tenue d'Eve, c'était franchement gênant pour elle ! Encore, si ça avait été sa frangine, ça aurait été plus naturel et elle s'en serait moquée, mais là... ce n'était même pas comme si c'était une amie proche ni rien ! Juste une étrangère qu'elle devrait apprendre à connaître à cause d'une histoire surnaturelle de lien et de magie.

Le soulagement revint lorsque l'arabe quitta enfin la pièce. Il suffirait de ne pas en reparler, de ne pas y repenser, et tout irait comme sur des roulettes ! L'adolescente tendit le bras hors de la douche et s'empara d'un petit essuie, histoire de se sécher. Une fois qu'elle fut bien sèche, elle sortit de la douche tout en s'essuyant les cheveux... et remarqua les vêtements. Une seconde. Qu'est-ce que.... ?! Les sales petites... bon sang, elles avaient pas osé lui faire ça tout de même ?! Mais merde ! Les yeux grands ouverts, le rouge aux joues, elle comprit que ces chipies venaient de lui faire un sale coup. Mais y'avait pas moyen qu'elle porte ça, rien à faire ! Déjà, les sous-vêtements d'une inconnue, c'était pas vraiment sa tasse de thé... mais les mini shorts moulants, encore moins ! J'vous parle même pas de porter un haut tout aussi moulant quand on a même pas de soutif ou de la ceinture flashy... NO WAY ! Loin de se décourager, elle fouilla toute la salle de bain mais ne trouva aucun peignoir. Rien ne lui permettait de se vêtir mis à part ces vêtements trop fashion à son goût. L'arabe avait même emporté ses affaires à elle !
Finalement, elle s'approcha de la porte et se mit à crier :

-"Ha, ha... c'que c'est drôle ! Allez, assez rigolé, filez-moi de vraies fringues quoi !"

Mais bon, aucune réponse positive ne parvint à ses oreilles. Commençant à paniquer un petit peu, elle recommença à crier en tambourinant la porte :

-"Allez, là ! J'porterai pas ça de toute façon, même pas en rêve ! J'veux mes fringues !"

Si elle n'était pas aussi pudique, elle aurait pu sortir de là récupérer ses affaires sans devoir porter ce qu'on lui avait laissé... elle se dit qu'elle pouvait toujours nouer son essuie autour de sa taille et sortir comme ça, les deux autres avaient déjà vu une paire de seins vu qu'elles en avaient elles-même... quoique, c'est pas comme si l'arabe en avait vraiment... mais non ! Rha, non, elle ne pouvait pas se résoudre à faire ça ! Tout comme elle ne pouvait pas se résoudre à sortir habillée avec ces trucs sur le dos. Ha, elles voulaient se la jouer comme ça ? Elles allaient voir !

-"C'bon j'ai pigé ! Moi j'sors pas d'ici tant que j'ai pas récupéré mes affaires, même si je dois squatter toute la nuit !"

Elle posa l'essuie sur son épaule et s'adossa contre un mur, en face de la porte toujours verrouillée, bras croisés sous la poitrine. Rien à faire, elle ne sortirait plus d'ici tant qu'elles ne se seraient pas décidées à arrêter cette farce stupide ! Et n'allez pas penser qu'elle avait dit ces dernières paroles en l'air... elle était vraiment déterminée à dormir dans la baignoire s'il le fallait, mais elle ne comptait pas céder la moindre once de terrain ! La salle de bain était devenue son territoire et elle ne comptait pas se laisser coloniser aussi facilement.

Na !

L'appareil photo que j'avais prévu sur les conseils d'Ashura ne fut pas très utile en fin de compte ; Yun Li avait établi un camp de base dans la salle de bain et refusait catégoriquement d'enfiler les vêtements que nous lui avions trouvé. A ses requêtes, nous ne répondîmes que par des rires étouffés qu'elle ne pouvait entendre depuis son bunker, et nous comprîmes qu'elle allait camper dans cette pièce jusqu'à ce qu'on lui rende son tee-shirt miteux.

*Il va bien falloir qu'elle sorte pour manger...*

*Très drôle...*

"Elle ne plaisante pas, quel caractère..."

Je m'approchai de la porte qui marquait la frontière entre le territoire des filles et celui du garçon manqué ; la porte était verrouillée, mais je connaissais bien le système de fermeture pour m'être entraîner dessus à mainte reprise. Ouvrir la porte ne me pauserai pas de problèmes, mais était-ce la solution la plus judicieuse ? Il fallait obliger Yun Li à quitter son territoire ; je supposais qu'elle préférait encore porter des vêtements que de se balader à poil. Je regardais Ashura par dessus mon épaule et murmurai :

"Si seulement on pouvait l'obliger à sortir, je l'attendrai à la sortie avec l'appareil... "

Yun Li se mordillait la lèvre nerveusement à l'intérieur de la salle de bain, réfléchissant à un moyen de sortir de là avec quelque chose de potable sur le dos. S'être rendue maîtresse d'une place forte c'est bien, mais d'une place forte sans vivres et incapable de fonctionner en autarcie... ça l'est moins ! Il faudrait bien qu'elle sorte un jour ou l'autre, c'est pourquoi elle devait trouver une solution le plus rapidement possible. En même temps, si elle arrivait à déjouer le plan des deux autres d'une main de maître, elle aurait de quoi s'en vanter pendant un bon moment, ça c'était clair. Hélas ! Tout ça, c'était sans compter sur l'arabe et son étrange pouvoir... d'un seul coup, ce fut l'attaque du clone en plein dans la place forte. Yun, déboussolée par le fait que le clone pouvait apparaître n'importe où comme ça regarda le dit clone avec des yeux de merlans fris, oubliant l'espace de quelques secondes qu'elle ne portait rien sur le dos et qu'elle était un peu pudique.
L'arabe s'approcha avec le but non dissimulé de bouton la chinoise hors de son château fort, tandis que la dite chinoise rougissait de plus en plus en se rendant compte de ce qui était en train de lui arriver. Non, mais... non ! La sale vile, elle avait osé ! Le rythme cardiaque au maximum, rouge comme une tomate ayant mangé trop de piment, l'adolescente ne put retenir un grand cri qui résonna probablement dans tout l'étage du loft. S'il y avait eu des voisins, ces derniers auraient sans doute appelé les pompiers en pensant que quelqu'un allait se faire égorger ! L'instant d'après, elle se retrouvait avec la serviette de bain un peu trop courte à son goût sur la poitrine, les jambes bien serrées et la main libre cachant son intimité sud autant qu'elle le pouvait.

-"Dégage d'ici tout d'suite, merde !"

Aussi faible qu'il pouvait l'être, le lien devait surement permettre à l'arabe de ressentir toute la gêne de sa binôme. La pauvre chinoise, elle, avait l'impression d'en faire un peu trop mais elle ne pouvait pas s'en empêcher : elle ressentait autant, si pas plus, de gêne à se déshabiller devant une femme que devant un homme. Alors qu'au final, ce n'était pas comme si toutes les nanas étaient comme elle et en profitaient pour mater, quoi ! Fin', c'est pas comme si elle-même se permettait de dévorer les autres filles du regard dès qu'elles avaient le malheur de se dessaper devant ses yeux non plus, au contraire, elle était gênée pour elles et détournait plus souvent le regard qu'autre chose. Le pire dans tout ça, c'était que cette gêne était uniquement due à ses penchants particuliers : elle était loin d'être complexée par son corps et n'avait de toute façon pas de raisons de l'être.
Bon allez, il fallait se calmer et relativiser un peu : après tout, l'arabe n'avait vu qu'une poitrine et quelques poils, pas de quoi en faire tout un plat ! ... si ? Mieux encore, maintenant que l'arabe avait commis la terrible erreur de sacrifier son clone dans une mission d'espionnage suicide, elle pourrait toujours sauter sur Ash'2 et lui prendre ses fringues de force ! Bwa ha ha ! Un plan parfait. ... ou pas en fait. Parce que, mine de rien, le clone pouvait toujours se défendre. Yun se voyait mal plaquer une blonde au sol de tout son poids, à poil, et lui retirer ses vêtements. Rien qu'à imaginer la scène, le rouge de ses joues s'était intensifié. Bon sang, si ses mains n'avaient pas été occupées à quelque chose de plus important, elle s'en serait bien arraché ses cheveux en bataille ! Un si bon plan gâché parce qu'elle venait de considérer comme un fantasme tout droit ressortit de son subconscient pervers.

Il fallait donc trouver autre chose... craignant que l'arabe ne se jette sur elle pour la forcer à s'habiller ou sortir, la chinoise recula jusque dans un coin de la salle de bain et s'y colla le plus possible. Vite, un moyen de faire sortir le clone sans devoir utiliser la force... un moyen... un moyen... TILT ! Les fantômes ! Il fallait qu'elle arrive à créer un fantôme pour lui faire peur, histoire qu'elle sorte de là en pleurant comme un bébé ! N'ayant pas vraiment confiance en ses pouvoirs, notre p'tite chinoise ferma les yeux et repensa au p'tit spectre de tout à l'heure, implorant mentalement à ce dernier de revenir lui prêter main forte. Et ce qui devait arriver... arriva ! La tête éthérée de la mini chinoise fantôme se pencha par dessus l'épaule du clone en ricanant, ricanant déjà de toutes les blagues qu'elle allait pouvoir faire. Le chat pourrait attendre un peu, la mission du moment était : terroriser l'arabe.

P'tit fantôme usa donc de toutes ses compétences en matière de show d'horreur : il tira sur ses propres joues et tira la langue au clone. Flebleblebleb...

Visiblement, la présence d'Ashura dans la salle de bain eu l'effet escompté, à en juger par les décibels qui firent trembler les vitres. La petite avait du coffre ; elle ne manquait pas de ressource non plus car la suite tourna en notre défaveur. Je n'entendis plus les plaintes de Yun Li, et sentis Koneko se détendre un peu ; la Ashura qui était restée à côté de moi se crispa légèrement et j'en déduisis que l'attaque allait sans doute être déjouée. Il fallait que j'intervienne.

"Ashura, reprends toi, c'est juste un p'tit fantôme de rien du tout, il ne peut rien te faire ! J'en ai déjà affronté beaucoup !"

*Sauf que c'était à la télé dans une série fantastique...*

Je me redressai et armée de mon appareil photo, je plaçai ma main à l'endroit où se trouvait le verrou de la porte. Mes entrainements sur cette serrure avaient portés leurs fruits, je pus l'ouvrir aisément et, en donnant une bonne impulsion devant moi, ouvrir la porte pour faire irruption en territoire ennemi. L'appareil droit devant moi, je mitraillai sans me soucier de ce que je prenais en photo : une chinoise tenant une petite serviette de bain pour cacher sa nudité et une arabe en train de se faire chahuter par un fantôme fringué comme une bad-girl, en plus blanc.
Avisant d'un coup d'oeil le regard assassin que m'adressai Yun Li, Je me postai devant la porte et, une fois que j'eus pris quelques clichés, je glissai mon appareil photo, heureusement ultra compact, dans mon soutien-gorge, un endroit que je pourrai défendre facilement et qui perturberait la chinoise si elle tentait de le récupérer ; si jamais elle tentait ce genre d'action dans sa tenue actuelle. Je souriais à la scène en face de moi puis dit en m'adressant à Yun Li :

"Je crois que tu n'a plus le choix, il va falloir que tu mettes ces vêtements... De toute façon, les vêtements du clone d'Ashura disparaissent en même temps que lui, tu te retrouverai nue au milieu du centre commercial ; et là il n'y aurait pas qu'elle et moi pour admirer ton corps."

Je n'étais absolument pas certaine de ce que j'avançais, mais je trouvais l'argument convaincant, et je jetais un coup d'oeil à Ashura comme pour chercher une confirmation ; ou une infirmation. Toujours dans l'encadrement de la porte, je croisais les bras sous ma poitrine et poursuivis.

"Et puis ça me vexe un peu que tu refuses de porter ces vêtements, ce sont les miens, je m'habille comme ça et je n'en meure pas." dis-je en tirant la moue. "Et ce n'est que temporaire, juste pour aller t'en acheter d'autre, ca ne va te faire de mal tout de même !"

Je me demandais tout de même quel genre de déplaisir elle pouvait trouver à porter ces vêtements. Etait-ce seulement parce qu'ils m'appartenaient et qu'elle ne voulait pas porter des habits qu'une autre avait déjà porté ? Etait-ce parce qu'elle me jugeait trop pouffe à ses yeux et que la dernière chose dont elle avait envie était de me ressembler physiquement ? Elle avait pourtant un superbe corps, de beaux yeux et de magnifiques cheveux bruns ; si elle était déjà très belle, elle ne perdrait certainement rien à devenir un peu plus féminine . Les goûts et les couleurs...